Poezii
Mihai Eminescu
Au long des peupliers

Au long des peupliers en vain
Je suis souvent passé,
Me connaissaient tous les voisins-
Mais tu m'as ignoré.

Vers ta fenêtre qui brillait
Je regardais épris
Quand tout un monde comprenait-
Tu ne m'as pas compris.

Combien de fois, mon grand amour
Réponse a attendu!
Si tu m'avais donné un jour,
Heureux m'aurais rendu;

Si l'on avait été amis
Dans notre tendre ardeur
En écoutant ta bouche ainsi,
Une heure et que je moure.

Si tes yeux m'avaient donné
Rien qu'un seul rayon,
Une autre étoile aurait brûlé
Devant les horizons.

Tn eusses vécu à jamais
Au long des temps, des vies
Avec tes bras prenant l'aspect
Du marbre froid exquis;

Image toujours adorée,
N'ayant plus de pareilles
Les fées qui viennent des contrées
Où naissent les merveilles.

Aux yeux païens je t'aimais tant
Aux yeux si lourds de peine
Que me laissèrent les parents,
Ma race très ancienne.

Aujourd'hui je ne regrette
Que moins souvent j'y passe,
Qu'en vain se pencbe encor la tête
Pour me revoir, hélas !

Car tu ressembles maintenant
Aux autres dans ton port,
Je te regarde indifférent
De l'oeil glacé de mort.

Mais tu devais t'abandonner
A ce profond mystère,
Et sous l'icône rallumer
Bougie d'amour sur terre.


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